L’année 2021 est là, et je vous prie d’accepter tous mes voeux les plus sincères, de santé, de joies quotidiennes et de réussite dans les projets qui vous tiennent le plus à coeur. 2020 a été une année très difficile pour tout le monde, mais, il faut avoir le courage de le dire, elle a été aussi, comme les précédentes, et pour beaucoup d’entre nous, une année riche de belles et nouvelles expériences, malgré le fait qu’on soit parfois tenté de l’oublier, en raison d’une sorte de devoir de condamnation général. Je ne sais pas ce que nous réserve 2021, mais, en écrivant ce modeste post, alors que je devrais être en train de corriger mes copies d’histoire des idées politiques, et en écoutant On the Reel, du compositeur contemporain Gwenaël Mario Grisi, découvert grâce à mon oncle, et qui fait écho à mon amour immodéré pour les musiques de film, je repense à quelques plaisirs et moments de bonheurs partagés en 2020 : une belle interview pour Vivre au Lycée, rendue précieuse par des questions inspirées et d’une grande pertinence de M. Fabien Cluzel, posées de vive voix, qui plus est, ce qui est préférable que les réponses que l’on fait par courriel ; une monographie pleinement rédigée, et qui, même si elle n’est pas encore publiée, m’a permis d’exprimer plus clairement que je ne l’avais jamais fait, certaines de mes conceptions les plus profondes sur l’utopie et sur son rôle dans la culture juridique et dans l’histoire de l’Imaginaire ; une petite nouvelle de presque rien du tout, mais dont l’écriture, vive et amusée, m’a empli de bonheur, l’histoire d’un quartette d’oeufs mélomanes, pour une revue en ligne dont la finesse n’a d’égale que la gourmandise de son équipe éditoriale, personnifiée par Emmanuel Desestré (et Nathalie Labrousse) ; une série de mini-podcasts sur les utopies, pour Cannes Université, que quasiment personne n’a écouté, mais qui m’ont permis de comprendre à quel point j’aimais ce mode de communication, que j’ai aussi développé pour mes étudiants (si je n’avais fini enseignant, j’aurais sans doute fait de la radio, et, au fond, ennuyé beaucoup plus de monde encore, hum 🙂 Mais, surtout, il y a eu tout le défi de la continuité pédagogique qu’il a fallu assurer durant les deux premiers confinements, d’abord en mars-avril, puis en octobre-novembre. Inventer, grâce aux outils numériques disponibles, une nouvelle manière d’enseigner, d’accrocher l’attention des étudiants, de maintenir leur motivation, de répondre à leurs interrogations, le tout dans un contexte institutionnel parfois très troublé, notamment par l’accélération des réformes. Cela a été délicat, difficile, parfois même épuisant, éreintant au sens littéral du mot (moi qui suis habitué à enseigner en déambulant, me retrouver contraint à rester assis sur ma chaise, face à l’écran, ça m’a coûté, vraiment !), mais, malgré des moments de solitude, face à une théorie de caméras et de micros coupés, et parfois des lignes de chat désespérément vides, dans l’ensemble, l’expérience a été belle, forte, et elle a renforcé, sinon ressourcé, mon goût pour l’enseignement. J’aime écrire, ô combien, de la fiction et de la non-fiction, et je me considère comme un auteur à part entière, quoique très irrégulier, en termes de production, mais j’ai réalisé à quel point l’enseignement m’était plus cher encore. Tenter d’expliquer, trouver de méthodes nouvelles pour rendre compréhensible telle ou telle idée, institution, mutation sociale, ou crise politique, et, surtout, échanger avec les étudiants, de tous niveaux, de l’année préparatoire de licence au doctorat, en visant l’utilité et la clarté, c’est, je crois le plus beau des défis. Surtout, je garde un souvenir fabuleux de l’usage pédagogique des jeux de rôles, aux côtés de mon cher ami Giulio-Cesare Giorgini. Ce qui m’amène à l’autre dimension de ce post, « … sed etiam ludere« , car il faut aussi, tout en enseignant, ou à côté des heures d’enseignement, s’amuser. Et, je n’ai pas honte de le dire, j’ai beaucoup « joué » en 2020, grâce à mes très chers Compagnons de la Tour Maudite, groupe de gentlemen rôlistes, que nous avons créé il y a déjà cinq ans, et dont les réunions mensuelles me sont devenues bien plus qu’un espace de liberté : une éthique. Plus souvent joueur que maître du jeu, j’ai incarné des elfes et des catcheurs, des espionnes et des marines, j’ai lancé toutes sortes de dés à 10, 20, ou 100 faces, et, de l’autre côté de l’écran, j’ai emmené les personnages de mes joueurs sur Mars et sur Encelade, je leur ai fait traverser les forêts du Grand Nord canadien, à la rencontre de l’Indicible, et, prochainement, ils monteront à bord du vaisseau le plus célèbre de la Fédération. Mais, le plus excitant, est encore que l’enseignement et le jeu se rejoignent, se croisent, s’interpénètrent, dans une exigence commune de règles, de cohérence, de communicabilité, de jouabilité ou d’intelligibilité, et, enfin et surtout, d’élan. Car tout est dans l’enthousiasme du propos, et la dynamique de la proposition qui doit toujours rester ouverte. Oui, en 2020, principalement, j’ai enseigné et j’ai joué. Et, entre nous, j’espère que cela durera encore longtemps… et même s’il faut en passer par les écrans, les masques, et les pis-allers numériques, qu’à cela ne tienne ! L’esprit n’a pas de limites, si le coeur bat. Ah, le morceau de Grisi est fini, Prokofiev prend le relais, joué par le talentueux Adrien La Marca, mais là, moi, je rends les armes. Jusqu’à demain 🙂
Félicitation Ugo. C’est un très bel article. Il reflète bien toutes les projets que tu as réalisé en 2020 dont certains sont encore en cours en 2021. Continue sur cette voie, c’est la bonne. Ton écriture a évolué dans le bon sens. Elle est plus fluide et réaliste que par le passé. Elle donne envie de poursuivre la lecture sur les univers qui te passionnent comme la science fiction ou l’histoire de l’humanité. Bonne année 2021 à toi aussi.
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Merci Benoit, ton soutien compte beaucoup et, comme on le dit en italien, « il futuro non è scritto ».
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